Représentation du bouquetin

Aperçu sur les représentations de bouquetin de la préhistoire à l’époque médiévale

Très présent pendant la Préhistoire, le bouquetin a été largement consommé, utilisé et surtout représenté pendant le Paléolithique récent en Europe, notamment dans la zone franco-cantabrique. Son importance symbolique est amplement démontrée par des figurations justement célèbres, comme celle d’un des bouquetins peints de la grotte de Niaux (Ariège, Pyrénées, France), la sculpture sur dent de cachalot de la grotte du Mas d’Azil (Ariège, Pyrénées, France), les bouquetins affrontés du Roc-de-Sers (Charente) ou de Lascaux (Dordogne), ou encore la harde de bouquetins sautant de la grotte quasi monothématique de El Bosque (Asturies). Le bouquetin est omniprésent tout au long du Paléolithique récent ; globalement, il arrive en troisième position après le cheval et le bison.
A l’Holocène, le bouquetin est même l’animal le plus représenté dans l’art mésolithique du Levant Espagnol et dans les arts rupestres postérieurs du Proche et du Moyen-Orient, jusqu’aux confins du Tibet (G.S.).

Avec les temps historiques, par contre, la représentation du bouquetin se raréfie. L’animal en général a une place immense au Moyen âge ; il est considéré comme un élément de la Création, porteur d’un message symbolique et moral voulu par Dieu ; il est présenté dans les encyclopédies ou dans des ouvrages qui lui sont entièrement consacrés, les bestiaires, non pour ce qu’il est, mais pour le sens dont il est porteur.  Et c’est parce qu’il est signifiant et exemplaire que l’animal peuple les églises médiévales, dans la sculpture comme dans la peinture. Son image participe à la représentation du Divin à célébrer comme du Mal à repousser.
Dans le riche corpus animalier médiéval, quelle est la place du bouquetin ? La « chèvre des montagnes » a pour caractéristique d’avoir une vue perçante : perchée sur un sommet, elle voit loin, embrassant le monde à ses pieds. En cela, elle est le symbole de Dieu qui est le maître de toutes les sciences, de toutes les choses et de tous les êtres. Cette belle image trouve sa place dans les bestiaires, même si le bouquetin est loin d’en être la vedette, mais elle ne semble guère avoir inspiré les sculpteurs ni les peintres romans qui ont pourtant peuplé d’animaux les églises et les cloîtres des montagnes pyrénéennes et de leur piémont. Peut-être symboliquement parce que priorité était donnée aux animaux représentant le Mal à rejeter, peut-être concrètement parce que c’était un animal déjà rare et vivant très loin des hommes. Le bouquetin apparaît un peu plus dans l’iconographie de la fin du Moyen âge, plus naturaliste et moins symbolique, mais il n’est toujours pas dominant. Une magnifique exception dans cette rareté de représentation est offerte par deux miniatures du Livre de chasse de Gaston Fébus, comte de Foix et grand connaisseur des Pyrénées (1387) (Cl.P.)

Georges Sauvet, ancien professeur des universités, membre associé du CREAP, Toulouse.
Claudine Pailhès, conservatrice générale honoraire du Patrimoine, ancienne directrice des archives départementales de l’Ariège

 

Citer ce texte : Pailhès Cl. et Sauvet G. 2022, Représentation du bouquetin in : Averbouh A., Feruglio F. & Plassard F. Dir. Base Jean-Clottes, Les représentations animales de la Préhistoire (BJC), "Dossier bouquetin",  mis en ligne le 15 Novembre 2022, https://animal-representation.cnrs.fr/s/bjc/page/representation-bouquetin

 

Références utilisées
Sauvet G., Feruglio V. & Plassard F. 2020. Le bouquetin dans l’art paléolithique. In Averbouh A., Feruglio V., Plassard F. et Sauvet dir. Bouquetins et Pyrénées. Tome I De la Préhistoire à nos jours. Offert à Jean Clottes, conservateur général honoraire du Patrimoine, Aix-en-Provence : Presses Universitaires de Provence, PréMed, 249-258

Pailhès Cl. 2020. Le bouquetin dans les Pyrénées du Moyen Age au XXe siècle. In Averbouh A., Feruglio V., Plassard F. et Sauvet dir. Bouquetins et Pyrénées. Tome I De la Préhistoire à nos jours. Offert à Jean Clottes, conservateur général honoraire du Patrimoine, Aix-en-Provence : Presses Universitaires de Provence, PréMed, 283-296