Lortet, grotte (Lortet, Hautes-Pyrénées, France)

Description

La grotte de Lortet, qui tient son nom de la commune de Lortet, dans les Hautes-Pyrénées, est située sur la rive droite de la Neste, un affluent de la Garonne. Appartenant à un ensemble assez complexe, elle est elle-même constituée de plusieurs salles et galeries, sur une longueur de près de 20 m.
Durant l'été 1873, alors qu'il fouillait la grotte voisine de Gourdan, É. Piette, souhaitant poursuivre ses recherches, a prospecté et découvert la grotte de Lortet (fig. 1a). Il y a immédiatement réalisé un sondage, dont il a présenté les résultats lors de la séance du 11 août 1873 de l'Académie des Sciences. Impatient, il n'a pas attendu d'avoir terminé ses fouilles à Gourdan pour commencer celles de Lortet et y travailler, de 1873 à 1876 (Piette 1873, 1874).
É. Piette a identifié dans la grotte de Lortet deux épaisses couches archéologiques, probablement attribuables aux Magdaléniens supérieur et moyen (entre - 13 000 et - 18 000 cal BP). Le niveau supérieur, scellé par un plancher stalagmitique de 20 cm d'épaisseur, est extrêmement riche. S'étendant sur plus d'un mètre d'épaisseur, il comprend plusieurs foyers, dont certains sont appareillés. Le niveau inférieur, apparaissant sous trois mètres d'argile stérile, est relativement moins fourni.
Dans la grotte de Lortet, É. Piette a donc recueilli un mobilier très abondant, composé d'industrie lithique*, d'industrie osseuse* et d'art mobilier*, dont la quantité et la qualité sont impressionnantes. Malheureusement, il n'a pas précisé dans ses publications la provenance stratigraphique de ces nombreux objets (Piette 1907).

Iconographie

Si la grotte de Lortet ne possède pas d'art pariétal, elle est en revanche connue pour l'abondance de son art mobilier, puisqu'elle a livré près de cent cinquante objets d'art (Chollot 1964, Bertrand 1996, Schwab 2008). En plus d'une trentaine de galets et plaquettes gravés, on peut compter des bois de cervidé entiers ou en portion (n = 5), des os (n = 25) – dont une dizaine d'oiseaux –, et un fragment d'ivoire, tous gravés. À cet ensemble s'ajoutent les nombreuses pièces de l'équipement en matières osseuses : cinq bâtons percés, plus d'une dizaine de lissoirs, spatules ou ellipses, une douzaine de ciseaux ou coins, et près de cinquante pointes de sagaies ou baguettes demi-rondes. Enfin, les éléments de parure comportent quatre contours découpés, trois rondelles découpées et quatre pendeloques (une en os, deux en bois de renne et une en stéatite).
Outre les décors géométriques, présents sur une centaine d'objets, les figures animales dominent. Les grands herbivores sont les plus nombreux, avec une vingtaine de figurations indéterminées, une dizaine de chevaux, de cervidés, de caprinés et trois bovinés. Les poissons sont bien représentés, au nombre de sept, alors que les oiseaux ne sont que trois. Certaines figurations, exceptionnelles dans l'art paléolithique, sont logiquement plus rares : un carnivore, un glouton et un serpent.

Représentation(s) d'animal(aux)

On compte, dans l'art mobilier de la grotte de Lortet, des représentations de caprinés (n = 9), de chamois (n = 2) et de bouquetins (n = 7).
Sur les sept figurations de bouquetins, deux ont été incisées sur des plaquettes de pierre (de schiste très précisément) et les cinq autres ont été gravées sur matière dure animale* : un petit fragment d'os, un fragment d'os long d'oiseau, un outil intermédiaire (ciseau) et une baguette demi-ronde*, tous deux en bois de renne.
Les représentations sont toutes partielles ou segmentaires, parfois en raison des fractures des supports. C'est le cas, notamment, des deux plaquettes gravées, qui sont brisées et ne laissent plus apparaître qu'une petite partie de l'animal, à savoir la corne pour l'une d'elles, et le haut de la tête pour l'autre. De la même manière, le petit fragment d'os gravé (Lortet f.3 et f.4), cassé aux deux extrémités, ne comporte plus que deux individus (une tête et un arrière-train) de ce qui était peut-être à l'origine une frise de bouquetins… Cependant, sur l'os d'oiseau et la pièce intermédiaire, les Magdaléniens semblent avoir fait le choix de ne dessiner qu'une tête. La plupart des bouquetins sont représentés de profil, aussi bien gauche que droit. Seul le bouquetin gravé sur la pièce intermédiaire est figuré de face.
D'un point de vue stylistique, c'est aussi la pièce intermédiaire qui déroge à la règle, avec une figuration extrêmement stylisée, schématique, voire géométrisée. Il s'agit presque davantage d'un signe évoquant l'animal que de l'animal lui-même. Les autres représentations de bouquetins sont naturalistes, avec de nombreux détails, tels que le naseau, la bouche, l'œil, souvent avec le larmier, l'oreille et le pelage. Sur les six têtes de bouquetins identifiées, trois sont figurées avec une seule corne, tandis que les trois autres en arborent deux, parfois mises en perspective. Trois cornes sont représentées sans leurs anneaux, dont les deux cornes de la figure de face simplifiée. Quand il est possible de définir le genre des bouquetins, dans cinq cas sur sept, il semble s'agir de quatre bouquetins mâles, avec de longues cornes, et d'une étagne, avec des cornes plus courtes.
Les figurations de bouquetins semblent adaptées aux formes des supports utilisés. En effet, les têtes ou la frise comprenant une tête et un arrière-train s'inscrivent dans des registres horizontaux, tandis que l'animal vu de face prend place sur un objet qui peut être lu à la verticale. Les bouquetins, tels qu'ils sont conservés, sont représentés seuls ou, dans un cas, par deux. Ils ne semblent donc pas associés à d'autres espèces animales. Ils côtoient en revanche des motifs purement géométriques, simples comme les stries ou les entailles, ou plus complexes.

Animal(aux) emblématique(s)

Le bouquetin gravé sur un fragment de baguette demi-ronde (MAN 47 286, Lortet f.1) est sans doute le plus caractéristique de la grotte de Lortet. Il est en effet incisé sur matière dure animale, comme la majorité des figurations. Il s'agit d'une représentation partielle – une tête et l'échine – orientée de profil, à la tête habilement figurée redressée, afin de s'adapter à l'étroitesse du support. Enfin, le style naturaliste* de ce bouquetin, avec ses nombreux détails, est remarquable.

Références

Piette 1873b, Piette 1874, 1907, Chollot 1964, Boivin et al. 1986, Delporte 1987, Bertrand 1996, Schwab 2008.

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Droits

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Citer ce document

Schwab, Catherine 2022. Lortet, grotte (Lortet, Hautes-Pyrénées, France) in : Averbouh A., Feruglio V. & Plassard F. Dir. Base Jean Clottes - Animal Representation, Les représentations animales depuis la Préhistoire, "Dossier Bouquetin", mis en ligne le 28 Septembre 2022, actualisé le 21 Juin 2023, consulté le 19 Avril 2024, https://animal-representation.cnrs.fr/s/bjc/item/6192

Citer le document original

Schwab, Catherine. Lortet, grotte (Lortet, Hautes-Pyrénées, France) in : Averbouh A., Feruglio V., Plassard F., Sauvet G. Dir. Bouquetins et Pyrénées - II - Inventaire des représentations animales du Paléolithique pyrénéen. Offert à Jean Clottes, Conservateur général du Patrimoine honoraire, 2022, 654 p.

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