Las Chimeneas, grotte (Puente Viesgo, Cantabrie, Espagne)

Description

Située sur le versant sud-ouest du mont Castillo (Puente Viesgo, province de Cantabrie), à près de 180 m d'altitude, Las Chimeneas est l'une des cinq grottes avec art pariétal paléolithique que renferme ce mont. Elle a été inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2008.
Sa découverte a été le fruit d'une prospection organisée sur le secteur pour découvrir de nouveaux sites, au vu de la forte concentration des sites pariétaux alors connus (on décompte aujourd'hui El Castillo, La Pasiega, Las Monedas et La Cantera) et de sites d'occupation parmi lesquels se détachent El Castillo et La Flecha. En 1953, A. García Lorenzo et J. Carballo entreprennent une étude géologique du mont Castillo et localisent une faille. À proximité, ils découvrent une cavité qui donne accès à un réseau souterrain.
Ils n'identifient aucun témoin archéologique dans le niveau supérieur et descendent, par un large gouffre, dans le niveau inférieur où ils découvrent les parois décorées. Plus tard, J. González Echegaray entame plusieurs prospections qui n'apportent aucune preuve d'occupation. Seuls quelques objets en silex (un denticulé, deux racloirs, trois lames et un éclat retouché qui ne peuvent être attribués à une culture précise) ont été trouvés en surface. En l'absence de tout témoignage d'occupation, la grotte de Las Chimeneas a vraisemblablement eu la seule fonction de sanctuaire.
Les études principales de l'art pariétal donnent lieu à deux publications monographiques (González Echegaray 1963, 1974) et à des datations 14C-AMS (Moure et al. 1996). La grotte se développe sur deux niveaux en un parcours de près de 420 m de longueur. Dans le niveau inférieur (d'environ 160 m de long), l'entrée originale, actuellement colmatée, a dû constituer une zone vestibulaire plus large qu'aujourd'hui. Elle rejoint la zone décorée par une galerie au parcours droit comprenant de nombreuses formations stalagmitiques. Vers la moitié du parcours, on trouve sur la gauche une galerie de dimensions réduites qui conduit au puits permettant de rejoindre le niveau supérieur. En sortant de cette galerie latérale, le parcours devient sinueux, jusqu'à une salle plutôt circulaire où se trouve une partie des motifs pariétaux. Les autres sont localisés dans un petit espace placé dans l'axe de cette salle. Le niveau inférieur continue ensuite sur une soixantaine de mètres par des passages exigus, et s'achève en une petite salle circulaire. Le niveau supérieur, d'environ 260 m de long, comprend de nombreux spéléothèmes répartis dans différentes salles et galeries.
Selon les critères stylistiques de A. Leroi-Gourhan, l'art a été considéré comme synchrone : il aurait été exécuté sur une période comprise entre le Solutréen avancé et le Magdalénien initial. J. González Echegaray le situe vers une date proche de 17 000 BP. Toutefois, deux dates 14C-AMS tendent à contredire cette hypothèse puisque l'une, réalisée sur un cervidé, donne 15 070 ± 140 BP (18 307 ± 172 cal BP) et que l'autre, obtenue sur des tracés noirs pouvant composer une forme pseudo-quadrangulaire, indique 13 940 ±140 BP (16 899 ± 231 cal BP).

Iconographie

L'art pariétal de Las Chimeneas compte 30 animaux identifiables, gravés et peints, parmi lesquels des cervidés (n = 13), des bovinés (n = 10), des caprinés (n = 5, dont un isard) et des chevaux (n = 2 ; González Echegaray 1974).
Les peintures noires de la salle des Peintures semblent organisées dans un espace de conformation compliquée. Espace ouvert et espace caché se répondent manifestement. L'ensemble commence par un bouquetin caché dans un recoin à l'entrée de la salle (Las Chimeneas f.2). Une retombée de voûte expose largement à la vue trois signes rectangulaires très élaborés. Sous cette même retombée, on trouve une tête de cerf et une tête de cheval très discrètes, puis un étroit passage donne accès à un espace de dimensions très réduites où sont assemblés cinq cerfs et un petit rectangle. À l'écart, très haut placés, se trouvent encore deux rectangles gravés.
Les gravures, essentiellement réalisées au doigt, commencent dans la galerie d'accès par un bouquetin (Las Chimeneas f.1), puis on note encore, parmi de nombreux tracés digitaux qui couvrent de grandes surfaces de la paroi et de la voûte, une très hypothétique ligne dorsale de bison et un cerf indubitable. À l'écart des peintures, sous une voûte basse, sur des retombées, ont été gravés plusieurs groupes d'animaux incomplets parmi lesquels les cerfs sont encore une fois dominants ; des biches, des bovinés, un bouquetin (Las Chimeneas f.3), un cheval et un isard apparaissent également.
La gravure a été réalisée sur une argile de décalcification qui couvre les parois au moyen de différentes techniques : au doigt, par incision avec un outil lithique, ou à l'aide d'un bâton appointé, mais une étude tracéo-fonctionnelle mériterait d'être faite. Le dessin, noir, est réalisé au charbon de bois au moyen d'un crayon. Dans le cas d'une biche en gravure digitale, la tête a été repassée par un trait noir (González Echegaray 1974 : 19).

Représentation(s) d'animal(aux)

Las Chimeneas compte trois représentations avérées de bouquetin (déjà publiées par J. González Echegaray 1974). Trois autres figures, plus schématiques et d'interprétation douteuse, ne sont pas retenues. Les trois bouquetins reconnus sont localisés dans le niveau inférieur de la grotte dans la galerie principale et à proximité, voire dans la salle des Peintures (fig. 1a). Ce sont des représentations incomplètes de la partie antérieure de l'animal dont seul le contour est tracé. Les détails sont généralement absents comme les éléments de remplissage de l'animal (pelage, ligne de ventre, etc.). Elles montrent une tendance à une disproportion entre tête et corps, notamment chez le capriné 2, et à une perspective incorrecte des cornes.

Animal(aux) emblématique(s)

La figure de bouquetin la plus emblématique est celle de la fiche 2 (Las Chimeneas f.2). Sa situation sous un faux plafond est particulière et nécessite de s'agenouiller pour la voir. C'est une figure incomplète (fig. 3) au contour bien défini qui présente un intéressant phénomène d'anamorphose puisque ses proportions varient selon l'endroit d'où on la regarde. Sa bouche est peut-être en relation avec de petites formations de calcite qui ont pu être utilisées pour donner plus de réalisme à la figure.

Références

González Echegaray 1956, 1963, 1974, Moure Romanillo et al. 1996, García-Diez & Garrido-Pimentel 2010, García-Diez et al. 2018b.

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Citer ce document

Garrido Pimentel, Daniel; García-Diez, Marcos 2022. Las Chimeneas, grotte (Puente Viesgo, Cantabrie, Espagne) in : Averbouh A., Feruglio V. & Plassard F. Dir. Base Jean Clottes - Animal Representation, Les représentations animales depuis la Préhistoire, "Dossier Bouquetin", mis en ligne le 28 Septembre 2022, actualisé le 5 Novembre 2023, consulté le 18 Avril 2024, https://animal-representation.cnrs.fr/s/bjc/item/6208

Citer le document original

Garrido Pimentel, Daniel; García-Diez, Marcos. Las Chimeneas, grotte (Puente Viesgo, Cantabrie, Espagne) in : Averbouh A., Feruglio V., Plassard F., Sauvet G. Dir. Bouquetins et Pyrénées - II - Inventaire des représentations animales du Paléolithique pyrénéen. Offert à Jean Clottes, Conservateur général du Patrimoine honoraire, 2022, 654 p.

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