Las Monedas, grotte (Puente Viesgo, Cantabrie, Espagne)

Description

La grotte de Las Monedas se trouve sur la rive gauche de la rivière Pas, à Puente Viesgo (province de Cantabrie). Elle fait partie – avec El Castillo, Las Chimeneas et La Pasiega – du groupe des grottes décorées du mont Castillo et possède le parcours le plus long.
Il s'agit d'une grotte de grande dimension qui renferme un gisement archéologique difficile à évaluer : en effet, la presque totalité des sols a été altérée dans les années 1950, lors des travaux réalisés pour en permettre la visite. Les vestiges décontextualisés qui en résultent feraient remonter la fréquentation de la grotte au moins du Paléolithique moyen à la préhistoire récente, puis à des incursions historiques jusqu'au xvie siècle.
L'ensemble pariétal a été découvert en 1952 par un pasteur local et authentifié par F. Puente (chef des guides de la grotte d'El Castillo) et par A. García Lorenzo (ingénieur des Ponts et Chaussées de la province de Santander) dans le cadre des prospections dans le mont Castillo, à la recherche de nouveaux ensembles décorés. Après les premières notes évoquant cette découverte (Ripoll Perelló 1952a, 1952b, 1953, González Echegaray 1952a, 1952b), une première synthèse complète des figures noires a été publiée sans signature (Anonyme 1953). Presque vingt ans plus tard a été publiée la première – et la dernière jusqu'à ce jour – grande étude monographique de l'ensemble pariétal (Ripoll Perelló 1972), dans laquelle l'auteur qualifie la première synthèse de fantaisiste (op. cit. : 24) et reproche aux auteurs de reproduire des relevés sans son accord.
Les derniers apports à la connaissance de cet ensemble ont consisté en la réalisation de datations directes de certaines peintures (Moure et al. 1996, voir ci-après) et en la publication du panneau de la colonne du vestibule, où a été décrite une série de motifs gravés (Cabrera & Múzquiz 2000), d'origine anthropique douteuse. En 2013, une équipe interdisciplinaire de quatorze chercheurs, dirigée par A. Ruiz-Redondo, a entamé un nouveau projet d'étude intégrale du gisement, toujours en cours.

Iconographie

L'art pariétal paléolithique de Las Monedas est presque exclusivement concentré dans une galerie latérale élevée et de plafond bas, contrairement au reste de la cavité et à son prolongement en une étroite chatière. Toutes les unités graphiques sont regroupées dans cette petite zone bien délimitée (fig. 1a et 1b), à l'exception d'une figure animale et de quelques tracés d'attribution chronologique douteuse (voir ci-après).
Cet ensemble est très homogène sur le plan technique : tous les motifs sont tracés en noir, à l'exception des quelques traits gravés d'origine douteuse. Bien que, stylistiquement, cet ensemble ait toujours été considéré comme un tout unique, on peut le subdiviser en deux sous-ensembles. L'un est formé par les figures zoomorphes et quelques motifs abstraits ; l'autre est constitué par un grand nombre de signes et de tracés noirs qui n'ont pas de parallèles clairs avec l'art paléolithique européen. Ces deux ensembles partagent les mêmes emplacements – et, dans de nombreux cas – les mêmes panneaux de la galerie décorée. Le premier présente toutes les caractéristiques du graphisme du Magdalénien supérieur-final cantabro-pyrénéen, comme le confirment les trois dates directes 14C-AMS publiées (Moure et al. 1996). Le second ensemble est difficile à classer : bien qu'il ait été traditionnellement attribué au Paléolithique récent (Ripoll Perelló 1972), l'absence de parallèles stylistiques de ces signes dans l'art de cette période et les similitudes de certains d'entre eux avec l'art dénommé « schématique » (documenté dans la grotte voisine d'El Castillo) font douter de cette attribution chronologique. Nous espérons prochainement apporter des éléments de réponse en datant directement au 14C certains de ces motifs.
Dans le cadre du programme d'étude actuel (Ruiz-Redondo dir.), nous avons recensé à ce jour 109 unités graphiques dont des figures animales (n = 40). Le cheval arrive en tête avec des figurations avérées (n = 16) et douteuses (n = 1). Il est suivi du bouquetin (n = 6), puis, par les cervidés, notamment les rennes (n = 4), bien représentés et de belle facture auxquels s'ajoutent biche (n = 1) et cervidé incertain (n = 1). Les bovinés (n = 4) se répartissent entre aurochs (n = 3) et bison (n = 1). La rareté de ce dernier est surprenante lorsque l'on sait que cette espèce arrive en tête à cette période dans la région cantabrique (Ruiz-Redondo 2014). Enfin, des figures d'ours (n = 1, de grande dimension avec plus de 1 m de longueur) et d'animal imaginaire (n = 1) complètent le bestiaire. Les autres zoomorphes de la grotte n'ont pu être identifiés clairement et ont été classés dans le groupe des indéterminés.

Représentation(s) d'animal(aux)

Las Monedas renferme six figurations de bouquetins (Ruiz-Redondo 2014), ce qui confère à cette espèce la seconde place, en nombre, du bestiaire représenté. Les numéros d'inventaire sont II.1.12, II.2.2, II.2.6, II.3.9, II.3.26 et II.3.27 (Las Monedas f.1 à f.6).
Toutes sont noires, comme les autres figures de l'ensemble pariétal, et dessinées sur une couche de calcite qui recouvre le calcaire des parois. Les bouquetins sont complets ou sans pattes ; les têtes isolées sont absentes. Il existe des différences de traitement entre figures, notamment dans les détails apportés, y compris au sein d'une même composition. Bien qu'elles soient toutes – même les plus simples – facilement attribuables à cette espèce, deux d'entre elles présentent des déformations peu naturalistes : l'une est exagérément allongée (II.2.2, Las Monedas f.2) et l'autre possède un corps fusiforme dépourvu de membres (II.3.27, Las Monedas f.6). Dans tous les cas, la perspective est uni-angulaire ou de profil absolu. L'encornure est systématiquement représentée, mais de façon très hétérogène : les cornes sont tantôt longues et à double courbure, tantôt courtes et rectilignes. Toutes sont intégrées dans des compositions, notamment les figures II.3.26 (Las Monedas f.5) et II.3.27 (Las Monedas f.6), qui se suivent sur le côté du grand panneau décoré.

Animal(aux) emblématique(s)

Le premier bouquetin emblématique (Mon-II.2.6, fig. 2, Las Monedas f.3) est considéré comme un mâle par E. Ripoll (motif no 16, 1972 : 17). La figure se situe à la limite de la surface lisse du panneau et de la croûte rugueuse qui le délimite à sa droite. Elle est disposée horizontalement et orientée vers la droite. Elle était complète à l'origine, avec les quatre pattes, mais à l'heure actuelle, la partie antérieure (tête, poitrail…) a été effacée par un ruissellement. Les extrémités sont naturalistes et représentées en perspective uni-angulaire donnant ainsi son type général à la figure. Les conventions graphiques identifiées sont la double ligne ventrale et le tracé épais et triangulaire de la zone cervicale.
La technique utilisée est celle du tracé linéaire noir, réalisé avec du charbon, ce qui a permis une datation par 14C-AMS de 12 170 ± 110 BP (GifA-95203) soit 14 086 ± 205 cal BP (Moure et al. 1996). La figure est à 86 cm du sol et son auteur l'a, d'évidence, dessinée en étant accroupi ou à genoux.
Le second bouquetin emblématique (Mon-II.3.26, fig. 3 et Las Monedas f.5) a été identifié comme un capriné par E. Ripoll (motif no 28, 1972 : 20). Il s'agit, en effet, d'un bouquetin complet, auquel manquent toutefois les antérieurs. Situé à 90 cm du sol, il est figuré légèrement ascendant, de profil, et statique. La tête est relativement détaillée avec une corne courte, un œil, une oreille et la bouche. Les conventions graphiques se traduisent par la double ligne ventrale et le trait élargi pour marquer la zone scapulaire.
La technique utilisée est le tracé linéaire noir modulé, il s'élargit sur l'épaule. Ce bouquetin forme une composition avec un autre bouquetin très simplifié, au corps exagérément allongé (Mon-II.3.27, Las Monedas f.6) placé derrière lui. Là encore, l'artiste devait être accroupi ou à genoux pour les dessiner.

Références

González Echegaray 1952a, 1952b, Ripoll Perelló 1952a, 1952b, 1953, Anonyme 1953, Ripoll Perelló 1972a, Moure Romanillo et al. 1996, Cabrera & Múzquiz 2000, Ruiz-Redondo 2014.

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Citer ce document

Ruiz Redondo, Aitor 2022. Las Monedas, grotte (Puente Viesgo, Cantabrie, Espagne) in : Averbouh A., Feruglio V. & Plassard F. Dir. Base Jean Clottes - Animal Representation, Les représentations animales depuis la Préhistoire, "Dossier Bouquetin", mis en ligne le 28 Septembre 2022, actualisé le 5 Novembre 2023, consulté le 25 Avril 2024, https://animal-representation.cnrs.fr/s/bjc/item/6221

Citer le document original

Ruiz Redondo, Aitor. Las Monedas, grotte (Puente Viesgo, Cantabrie, Espagne) in : Averbouh A., Feruglio V., Plassard F., Sauvet G. Dir. Bouquetins et Pyrénées - II - Inventaire des représentations animales du Paléolithique pyrénéen. Offert à Jean Clottes, Conservateur général du Patrimoine honoraire, 2022, 654 p.

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