Paglicci, grotte (Rignano Garganico, Foggia, Italie)

Description

La grotte Paglicci est située dans le vallon de Settepende, à hauteur des premiers contreforts du mont Gargano, en Italie méridionale, à 143 m au-dessus du niveau de la mer. Découverte en 1955 par R. Battaglia, la grotte fait partie d'un système karstique auquel se raccorde la Grotta dei Pilastri. Cette dernière ne montre aucune trace de fréquentation paléolithique. Des fouilles ont été conduites dans l'entrée actuelle (Atrium) par F. Zorzi au cours des années 1961 à 1963, puis sous la direction d'A. Palma di Cesnola de 1971 à 2001 et celle d'A. Ronchitelli depuis 2002.
La grotte Paglicci se compose de quatre salles (fig. 1b) : l'Atrium, où se sont déroulées les campagnes de fouilles (12 m d'épaisseur) ; les salles 1 et 2, où ont eu lieu de simples sondages ; la salle 3, qui renferme les peintures pariétales paléolithiques (fig. 1a). Les fouilles ont révélé la présence de vestiges du Paléolithique moyen ancien et des grands complexes du Paléolithique récent (Aurignacien, Gravettien et Épigravettien). Une sépulture (partielle) de l'Épigravettien final et deux sépultures du Gravettien évolué ont été découvertes au fil des campagnes de fouille. L'occupation de la grotte semble avoir été dissociée : activités domestiques dans l'Atrium et manifestations symboliques dans la salle 3.

Iconographie

L'art pariétal est concentré dans la salle 3 de la grotte, alors que les objets d'art mobilier ont, pour la très grande majorité, été trouvés lors de la fouille des niveaux épigravettiens.
Au moins trois chevaux et cinq mains ont été enregistrés dans la salle 3. Ces représentations constituent les seules peintures pariétales paléolithiques connues jusqu'ici en Italie. Elles pourraient dater du Gravettien final ou de l'Épigravettien ancien. De plus, une dalle montrant un arrière-train de cheval peint a été trouvée à la base du niveau 14A (Épigravettien ancien). Elle provient du plafond (ou d'une paroi) démantelé de l'Atrium qui, autrefois, devait être peint (terminus ante quem niv. 14B : 15 930 ± 200 BP (GrN-14322), soit 19 244 ± 237 Cal BP). Enfin, le rocher au sommet de l'entrée actuelle de la grotte portait des gravures géométriques et une série de traits plus profonds, formant peut-être une sorte de frise. Un bloc en faisant partie s'est effondré sur les couches 8 et 9 (Épigravettien évolué), nous donnant la possibilité de dater l'exécution de ces gravures (terminus ante quem niv. 9 :15 270 ± 220 BP (F-67), soit 18 511 ± 240 cal BP). Les techniques utilisées sont celles de la peinture et de la gravure.
L'art mobilier est, en revanche, plus commun : trente-trois objets gravés ont été décomptés. Ils proviennent des phases de l'Épigravettien ancien (n = 5), évolué (n = 14) et final (n = 4) ; dix objets n'ont pas pu être attribués à une phase précise ; la pièce portant une gravure de bouquetin provient du Gravettien évolué. Quinze sont sur supports osseux ; dix-huit sur galets ou blocs généralement calcaires.
Les thèmes identifiés, qui relèvent pratiquement tous de l'Épigravettien évolué, sont, à 45 % (n = 15 pièces), des motifs figuratifs, se répartissant entre bovidés (n = 9), cervidés (n = 6), oiseaux (n = 5), cheval (n = 3). Ils sont souvent associés entre eux et/ou à d'autres motifs, notamment géométriques et linéaires. Les pièces portant uniquement des motifs géométriques sont peu nombreuses (n = 4) et appartiennent principalement (toutes ?) à l'Épigravettien final ; celles à motifs linéaires et/ou traits gravés (n = 11) relèvent principalement de l'Épigravettien ancien. Enfin, trois pièces présentent des motifs indéterminés.

Représentation(s) d'animal(aux)

La grotte Paglicci ne compte qu'une seule représentation de bouquetin. Il s'agit d'une figure complète gravée finement sur une portion de l'extrémité proximale d'un fémur gauche de Bos primigenius (aurochs ; Mezzena & Palma di Cesnola 1972, Arrighi 2012). Elle a été mise au jour dans le niveau 20C de l'Atrium (fouilles novembre 1971), correspondant au Gravettien évolué à lamelles à dos tronquées ; le niveau a été daté de 22 220 ± 360 BP (F-48), soit 26 547 ± 379 cal BP, et 22 110 ± 330 BP (F-49), soit 26 442 ± 359 cal BP.
Représenté de profil droit, ce bouquetin est accompagné de motifs linéaires abstraits (verticaux et obliques) et géométriques (douze chevrons à apex tournés vers la gauche). Il montre des proportions très proches de la réalité, et plusieurs détails sont précisément indiqués : le canal lacrymal de l'œil, la crinière hirsute, la touffe de la queue, la délimitation entre la fourrure du dos et du ventre. Pour autant, son style naturaliste reste archaïque (fig. 2).
Bien que la pièce ait été cassée en sept morceaux (recollés lors des travaux de restauration), elle a pu donner lieu à une analyse poussée (sous microscopie digitale 3D) qui a permis d'en reconstituer l'exécution. Ainsi, l'os n'a subi, au préalable, aucune préparation de surface ni aucun dépôt d'ocre. Trois étapes principales ont ensuite été identifiées :
- la première est constituée de quelques lignes courtes et désorganisées, réalisées avec des outils différents ;
- la deuxième correspond à la gravure de la figure du bouquetin. Les traits sont peu précis comparés à ce que l'on observe généralement pour les gravures de l'Épigravettien, comme le montre la correction donnée à la courbe du museau. Toutefois, l'œil est représenté avec une précision anatomique remarquable : en dépit de reprises multiples, le canal lacrymal, typique des bouquetins, est parfaitement reproduit. Les cornes sont exécutées de bas en haut et sont formées par des lignes ouvertes. Le trait qui dessine le corps a été répété plusieurs fois avec un changement d'inclinaison de l'instrument à proximité de la queue. Le reste de la figure a été fait avec plus de confiance ;
- puis, on a réalisé de nombreuses lignes verticales et, finalement, les chevrons. En ce qui concerne les signes linéaires, les traits centraux sont mal définis, tandis que les supérieurs, en particulier ceux qui chevauchent les cornes, sont gravés avec insistance.
Tous les chevrons ont été effectués de haut en bas, toujours avec deux traits séparés et repassés plusieurs fois. Sur cet objet, qui est le plus ancien exemple d'art mobilier gravé en Italie, on souligne la coexistence de différentes expressions artistiques (figuratif et abstrait), et cela déjà à l'époque gravettienne.

Références

Mezzena & Palma di Cesnola 1972, 1992, Palma di Cesnola 2001, Arrighi et al. 2008, 2012.

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Citer ce document

Ronchitelli, Annamaria 2022. Paglicci, grotte (Rignano Garganico, Foggia, Italie) in : Averbouh A., Feruglio V. & Plassard F. Dir. Base Jean Clottes - Animal Representation, Les représentations animales depuis la Préhistoire, "Dossier Bouquetin", mis en ligne le 28 Septembre 2022, actualisé le 29 Août 2023, consulté le 23 Avril 2024, https://animal-representation.cnrs.fr/s/bjc/item/6228

Citer le document original

Ronchitelli, Annamaria. Paglicci, grotte (Rignano Garganico, Foggia, Italie) in : Averbouh A., Feruglio V., Plassard F., Sauvet G. Dir. Bouquetins et Pyrénées - II - Inventaire des représentations animales du Paléolithique pyrénéen. Offert à Jean Clottes, Conservateur général du Patrimoine honoraire, 2022, 654 p.

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