Chauvet-Pont d’Arc, grotte (Vallon-Pont-d’Arc, Ardèche, France)

Description

La grotte Chauvet-Pont d'Arc, découverte en décembre 1994, à proximité de Vallon-Pont-d'Arc (Ardèche), s'ouvrait, lors de son occupation préhistorique, en surplomb, à flanc d'escarpement de la rive gauche d'un méandre fossile de la rivière Ardèche. Son porche, aujourd'hui effondré (fig. 1a), devait être bien visible aux temps des premières cultures du Paléolithique récent, mais déjà caché au moment de la fréquentation des autres grottes ornées de la vallée (voir Ebbou).
L'accès actuel à la grotte a été aménagé depuis la voûte de la Salle Brunel, non loin de l'entrée d'origine. La topographie est assez simple (fig. 1b) : deux vastes salles (Salle Brunel et Salle des Bauges) devaient recevoir des bribes de lumière naturelle (Delannoy & Geneste 2020), la Galerie du Cactus s'ouvre sur la paroi est de la Salle des Bauges, plus loin la Galerie Rouzaud est un cul-de-sac. Peu après cette galerie, un passage resserré, le Seuil, conduit vers l'ensemble des espaces terminaux : la Galerie du Cierge aux très rares gravures, mais aux imposantes marques charbonneuses ; la Salle Hillaire aux parois et aux voûtes gravées, principalement au doigt ; la Salle du Crâne aux cinquante-trois crânes d'ours émergeant de l'argile et un posé sur un bloc rocheux ; la Galerie des Croisillons fait suite à cette salle, elle renferme une piste de pas humains (Garcia 2001) ; la Galerie des Mégacéros relie la Salle Hillaire avec la Salle du Fond, et son décor annonce les importants panneaux du dispositif pariétal final. Elle renferme également de nombreuses traces d'activité, notamment d'importants foyers et des points de combustion (Ferrier et al. 2014).
Les premières datations effectuées sur les dessins révèlent l'ancienneté de cet art pariétal que le style ne pouvait trahir a priori (Clottes et al. 1995). Les deux cent cinquante-neuf dates, notamment par radiocarbone, dont on dispose aujourd'hui, documentent deux phases d'incursions humaines : une première à l'Aurignacien pour réaliser les œuvres (entre 37 000 et 33 500 ans calibrés) et une seconde au Gravettien (entre 31 000 et 28 000 ans calibrés) ne laissant pour traces que des mouchages et des marques charbonneuses sur les parois, ainsi que quelques objets au sol (Quiles et al. 2016). Les animaux sont omniprésents par leurs empreintes (ours, canidés et bouquetin), leurs restes (plus de quatre mille quatre cent soixante vestiges osseux recensés), leurs griffades ou leurs bauges s'entrelaçant avec les passages humains (Fosse & Philippe 2003).
La cavité fait l'objet, depuis 1998, d'une recherche programmée avec une équipe pluridisciplinaire placée sous l'égide du ministère de la Culture, d'abord dirigée par J. Clottes jusqu'en 2001, puis par J.-M. Geneste et, depuis 2016, par C. Fritz.

Iconographie

L'art pariétal regroupe différentes techniques : peintures à l'ocre, dessins au fusain, gravures au doigt ou à l'outil. Les entités graphiques rouges se répartissent principalement dans les salles avant l'étroiture du Seuil ; les gravures prennent place dans la zone intermédiaire, et les grandes fresques au fusain occupent les salles terminales (fig. 2). Les représentations figuratives (n = 461 sur 760 entités graphiques) regroupent en majorité des félins (n = 79), des mammouths (n = 77) et des rhinocéros (n = 72), viennent ensuite les chevaux (n = 50), les bisons (n = 31), les cervidés (n = 20), les ours (n = 18), les bouquetins (n = 16) et les aurochs (n = 9). D'autres animaux sont beaucoup plus rares, deux bœufs musqués, voire uniques : le hibou, la panthère… La figure humaine est rendue présente d'une part par l'apposition de mains positives (n = 6) et négatives (n = 5) ainsi que par plusieurs panneaux de paumes ocrées tamponnées en nombre (groupement d'une dizaine à plusieurs centaines), et d'autre part par des représentations vulvaires concentrées (n = 4) dans la Galerie des Mégacéros qui annoncent le segment corporel féminin associant triangle pubien et jambes vus de face sur un pendant rocheux de la Salle du Fond (Le Guillou 2001).
Outre l'art figuratif, de nombreux signes se rencontrent dans tous les secteurs. Parmi eux, on citera les signes en « ω » comparables à ceux de la Peña de Candamo, dans les Asturies (Azéma & Clottes 2008), et des signes bilobés qui, avec les points-paumes, rapprochent Chauvet de la grotte aux Points (Gard) toute proche (Monney 2018, 2019).

Représentation(s) d'animal(aux)

Les seize représentations de bouquetins se répartissent dans l'ensemble de la cavité, avec un regroupement privilégié d'individus gravés (n = 9) à la jonction des salles Hillaire et du Crâne, à l'arrière du Panneau des Chevaux. La grande majorité est réalisée en gravure, quatre figurations sont dessinées à l'ocre rouge, et une seule l'est au fusain (voir ci-dessous bouquetin emblématique). Toutes sauf une (no 604 du Diverticule des Ours, voir fig. 3) représentent des mâles, insistant sur les cornes longues et figurant même un exemplaire sexué (celui utilisant les fissures naturelles en lieu et place de l'encornure no 603, voir fig. 3). Les détails ne sont jamais marqués : absence d'œil, de bouche, de naseau ou même de barbiche. Les pattes sont effilées ou inachevées. Ils sont, pour un tiers, complets, même si les membres peuvent manquer à certains ; un est un protomé volontaire (deux autres le sont probablement par altération). Les bouquetins sont en général isolés, une fois en couple (fig. 3) et, dans la concentration de la Salle du Crâne déjà citée, des encornures figurent seules (n = 3) pour accompagner deux sujets se suivant comme pour donner l'illusion de la harde. Dans l'ensemble, ils sont évoqués dans une certaine dynamique : cheminant, humant tête redressée…

Animal(aux) emblématique(s)

Ce bouquetin (no 326, fig. 4) est le plus achevé et le seul réalisé au fusain. La surface de ce lobe rocheux à l'extrémité nord de la Galerie des Mégacéros a été uniformisée par raclage pour cadrer ensuite l'animal qui se dirige vers le fond de la grotte. À hauteur d'homme, le fusain a généreusement tracé des contours qui ont été repris au doigt pour créer des nuances au niveau de la tête et de l'avant-train. Les cornes sont dessinées avec insistance par des gestes amples et évoquent le type alpin, de toute évidence au travers du genre mâle. Il domine une zone en encorbellement au sol jonché de charbons de bois, la zone de combustion la plus dense de la cavité. Cet animal fait face à un panneau regroupant des chevaux, des mégacéros et des bisons réalisés en gravure et fusain. Quelques mètres avant, sur la même paroi, prend place une composition de rhinocéros également en technique mixte.

Références

Clottes et al. 1995, Garcia 2001, Le Guillou 2001, Philippe & Fosse 2003, Azéma & Clottes 2008, Ferrier et al. 2014, Quiles et al. 2016, Money (dir.) 2018, 2019, Delannoy & Geneste 2020.

Licence

Droits

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Citer ce document

Feruglio, Valérie 2022. Chauvet-Pont d’Arc, grotte (Vallon-Pont-d’Arc, Ardèche, France) in : Averbouh A., Feruglio V. & Plassard F. Dir. Base Jean Clottes - Animal Representation, Les représentations animales depuis la Préhistoire, "Dossier Bouquetin", mis en ligne le 28 Septembre 2022, actualisé le 21 Juin 2023, consulté le 29 Mars 2024, https://animal-representation.cnrs.fr/s/bjc/item/6230

Citer le document original

Feruglio, Valérie. Chauvet-Pont d’Arc, grotte (Vallon-Pont-d’Arc, Ardèche, France) in : Averbouh A., Feruglio V., Plassard F., Sauvet G. Dir. Bouquetins et Pyrénées - II - Inventaire des représentations animales du Paléolithique pyrénéen. Offert à Jean Clottes, Conservateur général du Patrimoine honoraire, 2022, 654 p.

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