Isturitz, grotte (Isturitz et Saint-Martin-d'Arberoue, Pyrénées-Atlantiques, France)

Description

La grotte d'Isturitz fait partie des cavités de la colline de Gaztelu (communes d'Isturitz et de Saint-Martin-d'Arberoue, Pyrénées-Atlantiques), site majeur pour la Préhistoire européenne. Orientée nord-ouest-sud-est, elle consistait à l'origine en une très vaste galerie, de plus de 120 m de long sur une largeur atteignant par endroits 50 m, ouverte à ses deux extrémités dont l'une par un grand porche (de près de 20 m de large et 10 m de hauteur), au début du Paléolithique moyen.
Aux deux salles principales – la salle de Saint-Martin (ou salle sud) et la Grande Salle ou salle d'Isturitz (ou salle Nord) – s'ajoutent deux salles « annexes » – la salle des Rhinolophes et celle des Phosphates – et diverses petites galeries adjacentes reliant les différents secteurs (fig. 1).
Les recherches archéologiques menées de 1912 à 1922 par É. Passemard (Passemard 1944), et poursuivies par R. et S. de Saint-Périer jusqu'en 1959 (Saint-Périer 1930, 1936, 1952), ont permis d'identifier les principales périodes d'occupation, du Paléolithique moyen à récent, différentes selon les salles. Ces données ont été enrichies par les opérations conduites ensuite : diagnostic entre 1996 et 1998 (Normand & Turq 2007), fouille en 1999 (Barandiarán Maestu 1999) et, de 2000 à 2010 (Normand, 2005-2006), et depuis 2011, reprise de l'étude de l'art pariétal et mobilier (Gárate et al. 2013, 2016).
Les plus anciennes occupations reconnues sont datées du Moustérien, attribuables à un Moustérien de faciès vasconien pour le plus récent (Deschamps 2008). Si le Châtelperronien* parfois signalé est en fait un mélange de plusieurs industries (Bachellerie & Normand 2010), l'Aurignacien* est, en revanche, bien présent sur une superficie de près de 1 500 m2. Il témoigne d'intenses fréquentations du Protoaurignacien à l'Aurignacien ancien (entre 43 000 à 40 000 cal BP et 41 000 à 38 000 cal BP ; Barshay-Szmidt et al. 2018) et d'activités multiples, notamment dans la salle Saint-Martin (Normand 2005-2006). Les occupations attribuables au Gravettien* (à burins de Noailles) sont également particulièrement denses (Goutas 2004, Simonet 2009a) tandis que celles du Solutréen (ancien et supérieur) ne semblent avoir eu lieu que de façon sporadique. La grotte a de nouveau été un important lieu de vie au Magdalénien, entre 18 400 et 15 200 cal BP pour la salle d'Isturitz et vers 17 000 cal BP pour la salle Saint-Martin, renfermant le seul Magdalénien « classique » pyrénéen (Pétillon et al. 2009, Langlais 2010). La séquence s'achève sur des séries assez pauvres attribuées au Magdalénien final et à l'Azilien ancien (Langlais 2010).

Iconographie

L'art pariétal de la grotte d'Isturitz est réellement modeste en regard des amples dimensions de la cavité. Des entités graphiques (n = 22) ont été répertoriées, peintes en rouge, comprenant des taches, points et lignes sans aucune image zoomorphe, et des entités graphiques gravées (n = 14), majoritairement des animaux.
Les peintures rouges se concentrent dans la salle Saint-Martin dans un des deux petits diverticules à droite de l'entrée où se concentrent aussi les objets fichés dans les parois. Il en est de même dans la salle des Phosphates. Dans la salle Sépulcrale, une série de barres et une tache rouge accompagnent également des objets fichés en paroi (Gárate et al. 2013).
Le Pilier gravé se compose de 18 motifs (Gárate et al. 2016) confirmant les observations d'É. Passemard et augmentant l'inventaire établi par G. Laplace et I. Barandiarán. Il s'agit de 2 rennes, 2 cervidés, 2 bovidés, 2 oiseaux, 1 cheval, 1 glouton, 1 poisson, 1 signe, 3 animaux indéterminés et 3 ensembles de traits. Du point de vue technologique, le secteur gauche du panneau est beaucoup plus élaboré et mieux conservé. Le reste des figures gravées semble inachevé ou du moins a été réalisé avec moins de détails.
En ce qui concerne l'art mobilier, l'ensemble des objets ornés concernant les différents niveaux et les deux salles fouillées par É. Passemard et R. et S. Saint-Périer atteint le millier de pièces. Il s'agit d'une des collections les plus complètes et les plus abondantes d'art mobilier du Paléolithique européen dont l'inventaire détaillé reste à faire. Ces objets proviennent essentiellement des niveaux gravettien et magdalénien sur tous supports : lithiques, avec plus de 500 fragments de statuettes (Croidieu 2012), ou osseux, dont certains exceptionnels sur os de cétacés (Pétillon 2013, Rivero 2015), ou sur stéatite ou ambre (Saint-Périer 1930, 1936). Du Gravettien, on retiendra les plaquettes ornées de mammouths ou de bisons (Rivero & Gárate 2014) ; du Magdalénien moyen, ce sera le lissoir, connu comme « la poursuite amoureuse », le contour découpé* de bison sur os de cétacé ou la série de contours découpés de tête de cheval sur os hyoïde (Saint-Périer 1930, 1936).

Représentation(s) d'animal(aux)

Les représentations de bouquetins d'Isturitz sont au nombre de cinq ; toutes figurées sur des éléments d'industrie osseuse (lissoirs ou objets de parure) du Magdalénien moyen. Il s'agit uniquement de têtes ou de protomés. Techniquement, elles sont caractéristiques de cette période : gravures profondes en « V », ou en « V » dissymétrique, pour le contour, plus fines pour les organes sensoriels et les détails du pelage. Formellement, ce sont des têtes très élaborées avec de nombreux détails anatomiques internes (oreille, œil, naseau, bouche). Les nodosités des cornes sont également figurées et de nombreux détails du pelage apparaissent sous forme de lignes de hachures, une caractéristique des représentations du Magdalénien moyen pyrénéen, que l'on retrouve également sur des figurations de chevaux ou de bisons. Les caractéristiques formelles rapprochent ces bouquetins de ceux du Mas-d'Azil ou d'Enlène.

Animal(aux) emblématique(s)

Appartenant au niveau II (Saint-Périer) de la Grande Salle, ce bouquetin est le plus détaillé d'Isturitz (fig. 2). Il a été représenté sur une côte polie, probablement utilisée comme lissoir. De genre indéterminé, il est orienté vers la gauche. Il possède deux cornes sans anneaux, deux oreilles, l'œil, le naseau, la bouche ouverte et la langue. On note la présence de nombreux détourages, linéaires pour l'œil et le naseau, sous forme de hachures pour la ligne du front et le maxillaire. La figure est malheureusement couverte d'une pâte rouge récente qui remplit les traits gravés.
Cette tête est accompagnée d'une autre, de chamois, en vue de face, ainsi que d'un rang de chevrons latéral.

Références

Saint-Périer 1930, 1936, Passemard 1944, Saint-Périer & Saint-Périer 1952, Barandiarán Maestu 1999, Goutas 2004, Normand 2005-2006, Normand & Turq 2007, Deschamps 2008, Pétillon et al. 2009, Simonet 2009a, Bachellerie & Normand 2010, Langlais 2010, Croidieu 2012, Gárate et al. 2013, Pétillon 2013, Rivero 2015, Gárate et al. 2016, Barshay-Szmidt et al. 2018.

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Citer ce document

Gárate Maídagán, Diego; Rivero Vilá, Olivia; Normand, Christian 2022. Isturitz, grotte (Isturitz et Saint-Martin-d'Arberoue, Pyrénées-Atlantiques, France) in : Averbouh A., Feruglio V. & Plassard F. Dir. Base Jean Clottes - Animal Representation, Les représentations animales depuis la Préhistoire, "Dossier Bouquetin", mis en ligne le 28 Septembre 2022, actualisé le 31 Août 2023, consulté le 25 Avril 2024, https://animal-representation.cnrs.fr/s/bjc/item/6196

Citer le document original

Gárate Maídagán, Diego; Rivero Vilá, Olivia; Normand, Christian. Isturitz, grotte (Isturitz et Saint-Martin-d'Arberoue, Pyrénées-Atlantiques, France) in : Averbouh A., Feruglio V., Plassard F., Sauvet G. Dir. Bouquetins et Pyrénées - II - Inventaire des représentations animales du Paléolithique pyrénéen. Offert à Jean Clottes, Conservateur général du Patrimoine honoraire, 2022, 654 p.

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* Pour des raisons de sécurité des sites archéologiques, les géolocalisations signalées dans la BJC pointent vers les mairies des communes considérées.